Histoire de la protection de la nature et de l’environnement
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Après les réserves naturelles et les parcs nationaux, la recherche d’une troisième voie

Dans un pays comme la France o๠l’emprise humaine avait été et demeurait forte, il apparaissait évident que les parcs nationaux seraient peu nombreux en raison des exigences auxquelles ils devaient répondre et des oppositions locales à leur création. Toutefois, d’autres formules étaient pratiquées à l’étranger, notamment en Allemagne et en Grande-Bretagne, permettant de satisfaire les besoins en loisirs des habitants des grandes agglomérations, sans pour autant rechercher des buts scientifiques ou des sites naturels exceptionnels.

À l’initiative d’Edgard Pisani, ministre de l’Agriculture, qui s’était rendu en Allemagne en 1963, o๠il avait été intéressé par sa visite du Luneburger Heide Naturpark et d’Olivier Guichard, délégué à l’Aménagement du territoire, une mission à la tête de laquelle se trouvait Yves Bétolaud [1], fut envoyée en Allemagne fédérale, en Belgique et aux Pays-Bas en juillet 1964, pour étudier les réalisations de ces pays et particulièrement le système des Naturparks allemands. À son retour, elle rédigea un rapport préconisant d’adopter en France une formule voisine. Mais encore fallait-il se mettre d’accord sur une définition à la française et la traduire en termes administratifs et juridiques opérationnels. Plusieurs philosophies et propositions s’affrontaient.

Pour trouver une solution innovante et viable, un groupe d’étude interministériel animé par Serge Antoine et Henri Beaugé (1920-2015) se mit au travail et une commission ad hoc itinérante parcourut la France du Nord au Sud et d’Est en Ouest pour repérer et évaluer les potentialités de certains territoires à devenir des « parcs naturels régionaux  ». Ceux-ci devaient tout à la fois se distinguer des parcs nationaux et répondre aux aspirations économiques et sociales de ces territoires, souvent déshérités et aux nouvelles attentes de la société urbaine en mal de nature, de grands espaces et d’air pur. La formule n’était pas simple à mettre au point mais l’équipe constituée autour de Serge Antoine, faisant profit de toutes ces remontées du terrain saura finalement la trouver, bien qu’elle fà »t qualifiée par le rapporteur du décret en Conseil d’État de « droit à l’état gazeux  » !

Elle sera discutée lors des « journées de Lurs  » en Provence organisées par la DATAR en 1966 durant lesquelles, sous la houlette de Serge Antoine et de Jean Blanc, l’autre père des parcs, - un berger à la personnalité singulière et charismatique - fonctionnaires, techniciens, juristes, préfets et politiques confrontèrent leurs réflexions dans un enthousiasme partagé. Mais, paradoxalement, les protecteurs de la nature, dans leur ensemble, ne soutinrent pas le projet et en furent même très critiques, à l’instar de la presse nationale et du Canard enchaîné ; à l’exception d’un Michel Brosselin, et d’un Jean-Baptiste de Vilmorin (1930-2018), ce dernier affirmant que « c’est [à Lurs] qu’a été esquissée une conception de la protection de la nature qui inclut l’homme  ». Mais la DATAR et Serge Antoine n’eurent cure de cette opposition et d’autres, qui se manifestèrent. Ils continuèrent sur leur lancée et parvinrent à sortir l’année suivante, le décret du 1er mars 1967 que le Général de Gaulle voulut signer personnellement.

Quinze jours plus tôt, toujours à l’initiative de Serge Antoine, était mis sur pied un « cycle d’études et de formation  » des animateurs et (futurs) chargés de mission et directeurs de parcs, composé de seize postulants. Ils prirent le départ avec Jean Blanc, comme chef de file, pour un tour d’Europe d’un an en voitures, et même du monde avec les États-Unis et le Japon, dans une quinzaine de pays avec la mission de se former au contact des réalisations étrangères. À leur retour, ils seront envoyés dans les premiers projets de parcs (Landes de Gascogne, Morvan, Lorraine, Armorique, Vercors...) et trois ans après, les premiers parcs - huit sont créés de 1968 à 1970 - et ceux qui sont à l’étude créeront une fédération pour se rassembler et promouvoir leur identité.


Par Henri Jaffeux



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