Le défaut de l’organisation ainsi mise en place - car elle en avait un - était de ne disposer d’aucune ressource, les gouvernements s’étant assurés de n’encourir aucune obligation financière au moment de sa fondation. L’UIPN, qui s’était installée à Bruxelles à sa création, décida en 1960, de déménager ses bureaux en Suisse, à Morges, petite ville du canton de Vaud, au bord du Léman. Mais elle était à ce moment-là désargentée et accusait un sérieux déficit.
Si on prête à ces difficultés financières les raisons qui motivèrent initialement la création du WWF, il y en avait d’autres dans l’esprit de l’ornithologue britannique Max Nicholson (1904-2003) qui a été l’artisan de sa fondation avec notamment Julian Huxley. Nicholson parcourait le monde, l’Afrique en particulier, et il était très inquiet, avec d’autres naturalistes et conservationnistes de l’époque, de l’impact que pourrait avoir la décolonisation en marche sur le maintien des mesures de protection acquises. Son idée était que les États nouvellement indépendants puissent valoriser et tirer parti par le tourisme des parcs et réserves dont ils héritaient mais cela nécessité de pouvoir les aider financièrement. Or, ni l’UICN ni l’UNESCO ni les Nations Unies n’étaient en mesure d’y pourvoir. L’autre idée de Nicholson était de soutenir financièrement des projets de conservation de la nature, des espèces animales menacées en particulier en suscitant la création d’un fonds alimenté par des dons privés issus du monde des affaires.
Durant l’année 1960, il discuta de la faisabilité de son projet avec d’autres militants et experts soutenant cette cause à travers le monde. Puis tout alla finalement très vite. En avril de l’année suivante, le conseil d’administration de l’UICN adopta le « plan Nicholson  » qui prévoyait la création d’une fondation de droit suisse pour collecter et administrer des fonds. Cette décision sera connue plus tard sous le nom de « Manifeste de Morges  » faisant l’objet d’une déclaration internationale intitulée : « Nous devons sauver la nature dans le monde  ». Parmi les seize signataires, il y avait un français, François Bourlière, le précédent président de l’UICN.
En 1967, le WWF, présidé par S.A.R. le prince Bernard des Pays-Bas, organisa à Amsterdam le congrès « La nature et l’Homme  » qui rassembla 300 délégués en provenance d’une quinzaine de pays. On y débattit notamment de l’évolution du concept de conservation de la nature qui, de la « mise sous cloche  » devait tendre vers une protection plus ouverte et plus dynamique, notamment en Afrique.
Les discussions portèrent aussi sur les moyens de faire face aux « maladies de la civilisation  » dues à l’environnement artificialisé des agglomérations industrielles. Le professeur Bourlière qui s’y exprimait au titre de la France y déclara : « la Nature elle-même aidera à préserver la plus estimable des ressources naturelles dans les agglomérations urbaines, l’Homme lui-même  » ; ce qui, cinquante ans plus tard, donnera le concept des « Solutions fondées sur la nature  » mis en avant par l’UICN selon la définition qu’elle en donne aujourd’hui : « Nous nous fions à la nature et à la capacité des écosystèmes sains pour protéger les personnes, améliorer les infrastructures et assurer la richesse et la stabilité de la biodiversité à l’avenir  ». Le congrès conclut ses travaux par l’adoption de la Déclaration d’Amsterdam…et en lançant un « appel au monde  ».
En 1971, dix années après sa création, le WWF, dressant le bilan de son action, s’honorera d’avoir levé plus de 43 millions de francs et financé plusieurs centaines de projets dans 60 pays.