Ce colloque se tiendra à la faculté des lettres et sciences humaines de Limoges les 8 et 9 décembre 2016. L’entrée est libre.
Qu’elles soient le résultat de négligences ou de choix délibérés, les pollutions et les dégradations du milieu perçues comme autant de tributs versés à l’industrialisation ont suscité précocement des protestations, des contestations, des résistances et des conflits (Geneviève Massard-Guilbaud, Charles-François Mathis). Les recherches effectuées depuis une dizaine d’années en histoire environnementale ont en effet contribué à remettre en cause l’idée d’une césure complète dans les années 1960 et 1970 entre une société productiviste, toute entière tournée vers la célébration du progrès indissolublement social, économique et technique, et une société réflexive, consciente de son impact sur l’environnement et désireuse d’en limiter les conséquences négatives (Jean-Baptiste Fressoz, François Jarrige, Thomas Le Roux).
Dans ce domaine, l’histoire du droit de l’environnement constitue comme un écho, parfois à peine audible et parfois détourné de son objectif initial, des mobilisations et des conflits environnementaux propres à chaque période. A titre d’exemples, le décret du 15 octobre 1810 sur les nuisances industrielles répondit aux plaintes des voisins des fabriques urbaines d’acide sulfurique et de soude (Thomas Le Roux, Geneviève Massard-Guilbaud). La loi de 1906 sur la protection des sites et des monuments naturels de caractère artistique fut quant à elle obtenue par la Société pour la protection des paysages constituée en 1901 pour défendre les cascades du Lison menacées par la construction d’une conduite forcée.
Or, malgré l’importance de ces luttes symboliques, de nombreux cas de résistances environnementales restent mal ou peu connus, en particulier quand ces luttes, purement locales, se sont avérées vaines. De fait, certains combats restent en mémoire : la mobilisation du Club Alpin de France pour préserver les cascades de Gimel (Limousin) classées en 1898, les luttes des années 1970 sur le plateau du Larzac ou contre l’énergie nucléaire, etc. Mais beaucoup restent encore à découvrir dans les archives d’associations ou de collectivités territoriales. Dans ce domaine, il n’est pas impossible que l’importance du tournant environnemental des sociétés industrialisées au crépuscule des Trente Glorieuses ait amené de nombreux chercheurs à négliger l’importance des mobilisations antérieures.
Des études de cas en Limousin, en France et à l’étranger seront analysées pour mieux comprendre le rôle des instances de régulation de ces conflits ou analyser l’efficacité des outils juridiques de leur prévention. Ce colloque entend exhumer et mettre en relation ces résistances locales pour dégager les logiques à l’œuvre. Au-delà de l’inévitable idiosyncrasie de chaque événement, il est nécessaire de s’interroger sur la signification et les finalités de ces conflits et sur ce qu’ils révèlent du rapport des sociétés à l’idéologie du progrès technique, à l’industrialisation et à leur représentation de la nature. Ces conflits peuvent-ils être interprétés comme une forme de résistance à une certaine idée du progrès, comme l’expression d’une dissidence qui s’exprimerait de manière souterraine sur la longue durée - avant de devenir plus visible dans le dernier tiers du XXe siècle - ou comme un appel à plus de démocratie participative dans la définition des choix de société impactant l’environnement ?
Le colloque cherchera à éclairer l’histoire sociale et culturelle de ces résistances dans le cadre local et/ou régional des sociétés industrialisées. Quatre axes de réflexion structureront ce colloque : les motifs, les acteurs, les formes de l’action et les résultats de ces contestations et résistances.
Programme ci-joint.