Histoire de la protection de la nature et de l’environnement
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Une vue d’ensemble sur les espaces protégés européens

L’Agence européenne de l’environnement (AEE) vient de publier la première revue détaillée sur les espaces naturels protégés en Europe.

Les espaces naturels protégés couvrent aujourd’hui une partie relativement grande de l’Europe, soit presque 21 % du territoire des 32 pays membres et associés de l’Agence européenne de l’environnement (AEE). Malgré cette présence des espaces protégés dans tous les pays européens, cette matière n’a pas suscité autant d’attention au niveau Pan Européen que d’autres questions environnementales. Ce rapport - le premier publié par l’agence sur ce sujet à partir des travaux du Centre thématique européen sur la diversité biologique - devrait rétablir l’équilibre. Il fournit une vue d’ensemble et complète de l’état actuel des espaces protégés aux responsables des politiques publiques et aux publics avertis sur ces questions.

Ce rapport est particulièrement opportun, au sens que l’année 2012 marque le 20 ème anniversaire de la convention sur la diversité biologique et de la directive de l’UE sur la conservation des habitats naturels et de la flore et de la faune sauvages. Les deux instruments juridiques considèrent les espaces protégés comme les principaux outils dédiés au maintien et à la restauration de la biodiversité et des écosystèmes.

Ce rapport considère comme « espace protégé » un territoire au périmètre bien défini et classé par un pays sous la législation visant principalement la conservation de la nature c’est-à-dire la protection, la gestion et la restauration des espèces, des habitats naturels et des écosystèmes. Un espace protégé peut être ainsi n’importe quel secteur de la mer, des lacs, des fleuves ou de la terre qui a été identifiée comme important pour la conservation de la nature, et qui est contrôlé à cette fin. Il est important de remarquer que le statut des espaces protégés diffère considérablement sur la question de la limitation des activités humaines à l’intérieur de leurs limites. Quelques espaces protégés permettent à l’industrie, à l’agriculture extensive ou à la pêche de se poursuivre dans leurs limites, alors que d’autres interdisent toutes ces activités.

Le rapport couvre chacun des 32 pays qui sont des membres de l’AEE - 27 états européens et 5 états associés (Islande, Liechtenstein, Norvège, Suisse et Turquie) aussi bien que sept pays avec lesquels elle coopère : Albanie, Bosnie et Herzégovine, Croatie, l’ancienne République yougoslave de Macédoine, Monténégro, Serbie et Kosovo (sous la résolution 1244/99 du Conseil de sécurité de l’ONU). Les espaces protégés d’outre-mer des pays européens ne sont pas pris en compte dans ce rapport.

Au chapitre 1, les auteurs abordent le contexte historique de la création des espaces protégés. Historiquement, ils se sont révélés sous différentes formes : des réserves médiévales de chasse, à des parcs nationaux et à des réserves naturelles modernes. Ces différentes formes ont reflété les différents besoins de protection à des époques données. Ces espaces pouvaient protéger le gibier, la beauté de la nature, et plus récemment, sauvegarder la biodiversité. Le siècle dernier a vu une forte augmentation du nombre et de la superficie des espaces protégés classés par les états. Cette augmentation a été accompagnée de nouvelles règles et accords internationaux pour protéger la biodiversité par l’établissement d’espaces protégés. Les accords internationaux les plus importants pour des espaces protégés en Europe sont la convention de l’ONU sur la diversité biologique et les directives de l’UE sur la conservation des oiseaux et des habitats naturels. Ces deux dernières directives ont établi le réseau 2000.

Bien que la protection de la biodiversité soit l’un des principaux objectifs des espaces protégés aujourd’hui, il y a un certain nombre d’autres avantages apportés par les espaces protégés. Au chapitre 2, le rapport examine ces autres avantages, et récapitule les résultats de plusieurs études européennes en la matière. Il y a une variété d’approches pour évaluer les avantages des espaces protégés et il y a une discussion sur les méthode de calcul et d’estimation. Néanmoins, la société identifie de plus en plus les valeurs sociales et économiques des espaces protégés. Elle se rend compte également des services environnementaux que les espaces protégés fournissent au delà de préserver la biodiversité, telle que la séquestration du carbone, ou l’atténuation des effets des catastrophes naturelles telles que des inondations. Les travaux récents effectués pour le Commission européenne sur la contribution de Natura 2000 à l’économie européenne indiquent que les avantages du réseau peuvent être trois à sept fois plus élévés que le coût de sa mise en place. Ceci peut être particulièrement important pour le développement économique local et régional.

Les espaces protégés concernent une grande variété d’environnements, du littoral de la mer Noire aux alpages et des terres arides aux riches pâtures. Au chapitre 3, les auteurs examinent cette diversité plus en détail, afin de considérer l’influence de la biogéographie et des activités humaines sur le paysage et sur la biodiversité. Le continent européen est caractérisé par onze régions biogéographiques, avec très peu d’espaces purement sauvages : la mosaïque des paysages est le produit de l’influence humaine durant plusieurs siècles. Ce contexte de la diversité des régions biogéographiques et de l’histoire de l’influence humaine explique le nombre relativement grand d’espaces protégés en Europe et leur taille relativement petite comparées aux espaces protégés en Afrique et en Amérique. Cette influence humaine s’est accélérée dans les dernières décennies, ayant pour résultat une plus grande fragmentation du paysage due aux infrastructures et à l’urbanisation, et les deux ont rendu les migration de beaucoup d’espèces plus difficiles.

La diversité environnementale des régions biogéographiques de l’Europe est assortie d’une diversité des espaces protégés dans leur taille, leur buts et les approches de leur gestion. Au chapitre 4, le rapport donne un instantané de cette diversité en présentant les différentes catégories d’espaces protégés aux niveaux nationaux et supranationaux et en les comparant aux systèmes des espaces protégés situés en dehors de l’Europe. Les auteurs appellent l’attention sur le système des catégories développé par l’union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Ce système décrit les catégories de gestion des espaces protégés et des types d’activité humaine qui sont autorisés dans chaque catégorie. Cette diversité des espaces protégés a engendré des réseaux, où les groupements d’espaces protégés échangent l’information et contrôlent leur répartition selon des objectifs, des géographies ou des principes partagés.

Deux des réseaux européens les plus importants d’espaces protégés sont le réseau Natura 2000 de l’UE et son parent proche, le réseau Emeraude du Conseil de l’Europe. Au chapitre 5, le rapport étudie de façon détaillée la réalisation de ces deux réseaux et il dresse leur état actuel. Natura 2000 couvre actuellement près de 18 % de la superficie terrestre de l’UE, mais seulement 4 % des zones marines sous la juridiction des Etats membres de l’UE. Les études préliminaires sur Natura 2000 suggèrent qu’il y a maintenant une bonne connectivité - spatiale et fonctionnelle - à l’intérieur des frontières nationales. Cependant, la cohérence écologique globale pourrait être encore améliorée par des mesures de préservation globale de la nature ordinaire ; par le développement d’infrastructures « bleu » (marine) et « verte » (terrestres) permettant d’améliorer la cohérence et la résilience des espaces protégés. Le réseau Emeraude, qui applique l’approche de Natura 2000 à d’autres pays au delà de l’EU, est toujours dans sa phase initiale, et il est encore trop tôt pour en réaliser une évaluation complète.

Les désignations européennes telles que Natura 2000 et le réseau Emeraude ne sont pas les seuls types de désignation pour des espaces protégés. Les pays européens ont également leurs propres systèmes nationaux et régionaux d’espaces protégés. Au chapitre 6, les auteurs regardent la complémentarité entre ces désignations nationales et la mise en place de Natura 2000. Ce dernier couvre environ 70 % de toute la superficie des espaces protégés dans l’UE. Le rapport décrit quatre études de cas (Autriche, Estonie, France et Hongrie) pour illustrer la diversité des approches nationales. Il conclut que Natura 2000 a, à la fois accru la superficie des territoires bénéficiant d’une protection, et a renforcé la gestion des espaces protégés existants. Cependant, la manière dont ceci s’est réalisé n’a pas été uniforme à travers l’Europe. Dans quelques pays, il y a un chevauchement fort entre les espaces protégés nationaux prééxistants et Natura 2000, tandis que dans d’autres pays, il y a de grands espaces protégés qui ne sont pas inclus dans le réseau Natura 2000.

Il y a également une game d’instruments définissant des espaces protégés qui s’appliquent à la mer. Au chapitre 7, les auteurs observent la situation des espaces protégés marins couvrant les sites Natura 2000 marins, et la directive-cadre sur la stratégie marine de l’UE. Ils regardent également les quatre conventions sur les mers régionales, qui sont de plus petits accords internationaux entre des pays se partageant une mer, qui établissent leurs propres aires marines protégées (MPAs) en dehors du cadre Natura 2000. Les aires marines protégées font face à un certain nombre de défis. Le plus grand est celui de leur localisation. Il y a une tendance apparente à situer les aires marines protégées près du rivage, avec peu de protection pour des secteurs éloignés du littoral. Ceci signifie que le réseau de aires marines protégées tel qu’il se configure actuellement omet d’inclure des habitats importants et des espèces (telle que des poissons), et n’est donc pas écologiquement logique. Les auteurs pensent qu’une plus grande harmonisation entre les éléments de la directive-cadre sur la stratégie marine de l’UE et Natura 2000 pourrait aider à améliorer la cohérence et la représentativité des aires marines protégées.

Tandis que des progrès a été accomplis relativement à la désignation d’espaces protégés, il y a eu peu d’approches sur l’évaluation complète des espaces protégés. Au chapitre 8, les auteurs abordent certaines des évaluations qui ont été faites jusqu’ici. La plupart de ces évaluations mettent en évidence des lacunes en pointant des lieux qui sont importants pour la biodiversité, mais qui n’ont pas encore reçu la désignation d’espace protégé. Cependant, très peu d’études examinent l’efficacité réelle des espaces protégés dans le maintien et la restauration de la biodiversité. C’est en grande partie dû au manque de données disponibles sur la biodiversité, et les travaux en cours doivent établir de nouvelles méthodologies pour l’évaluation de l’efficacité des espaces protégés.

Le rapport peut être commandé à la librairie de l’EU ou il peut être téléchargé comme pdf sur le site de l’AEE


Par Henri Jaffeux

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  EEA 05-2012 Protected areas in Europe-an overview
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